fbpx
Skip to main content

VOUS ÊTES UN PARTICULIER  ∣  MODIFIER

« Parce que fumer c'est la loose, j'ai arrêté avec l'hypnose »

Un article de Grégory ESCOUFLAIRE, paru dans le magazine Elle en mars 2019.

On ne va pas en remettre une couche sur vos poumons, mais vous le savez : fumer tue. Il existe plein de façons d’arrêter de fumer. Certains - 5% seulement ! - y arrivent par la seule force de leur volonté. D’autres ont besoin d’un soutien, d’un cadre, d’une aide qui vient d’ailleurs. Bonnes résolutions de l’année oblige, on a testé pour vous l’hypnose. Attention, spoiler : on fumait. On ne fume plus.

« Aujourd’hui est le premier jour du restant de votre vie ! » : c’est ce qui est écrit, en gras majuscule, sur mon « certificat de réussite de libération tabagique » reçu à la fin des cinq séances d’hypnose collective auxquelles j’ai participé. Au début j’étais sceptique, mais finalement je me suis laissé aller… Et j’ai arrêté. Sans patchs ni rechutes. Qui a dit que l’hypnose était une vaste fumisterie ? Retour sur deux semaines de traitement intensif, à chasser le démon, son herbe et sa petite fumée.

JOUR -1 : LE RENDEZ-VOUS CHEZ LE DOCTEUR

Il s’appelle Eric Mairlot et il est président de l’Institut de Nouvelle Hypnose et de Psychosomatique, chargé de cours d’hypnose médicale à la Salpêtrière et président honoraire de la société belge d’hypnose de langue française. Bref, un sacré CV. De mon côté j’espère que ça va le faire, je viens en paix, j’ai envie d’arrêter. Je fume depuis longtemps, surtout quand je sors, je bois, je m’ennuie, je digère, j’angoisse, partout, tout le temps (les fumeurs savent). Bref je lui dresse mon petit portrait de fumeur décidé à reprendre sa santé en main. Il m’écoute calmement. Il veut entendre mes motivations. Mes peurs. Il m’explique ensuite les rudiments de l’hypnose et me propose de passer le « test de dépendance à la nicotine » (le « Test de Fagerström »). Soulagement : mon « niveau de nicotino-dépendance » s’avère étonnamment « bas ». Il faut dire que je ne fume pas ma première cigarette dans l’heure après le réveil (+++), et que je fume entre 10 cigarettes (« ou moins ») par jour (+++)… Sauf si je vois des amis, et tout ce qui s’en suit (on passe alors de « 11 à 20 », à l’aise). Des résultats à titre indicatif, mais qui rassurent déjà, un peu. Rendez-vous est pris pour la séance d’information collective, avant d’entamer les séances d’hypnose à proprement parler. 

JOUR 0 : LA SÉANCE D’INFORMATION COLLECTIVE

On débarque dans une salle d’hôtel où se dérouleront les séances. Une vingtaine de personnes, de tous âges, horizons et « niveaux de nicotino-dépendance », se regardent un peu en chiens de faïence. Certains n’ont pas l’air très fiers d’être là. D’autres en plaisantent. Il y a quelques récidivistes, qui connaissent déjà tout le protocole. On s’assied en rond, et chacun se présente et détaille, ou pas, ce qui l’amène : le comment du pourquoi il fume, ses motivations, ses doutes, ses envies. « Je ne veux plus être un esclave ». « Parce que ça m’emmerde de fumer ». « Pour faire plaisir à mes enfants ». « Pour retrouver du souffle ». « Une meilleure santé ». « L’odorat ». « Ne plus culpabiliser ». « Reprendre le contrôle de ma vie ». « Ne pas mourir ». Et cetera. Tout le monde a ses raisons, et elles sont toutes bonnes. Bref tous ces témoignages sont bons à prendre. Le Docteur nous rappelle les méfaits du tabac (sur ta fécondité, ton compte en banque, ta peau, ton cœur, ton sommeil, tes poumons, ta liberté, ton temps de vie,…), mais nous rassure par un argumentaire bien rôdé : « arrêter sera plus difficile que vous ne l’espérez, mais plus facile que vous ne le pensez ». Ok, c’est-à-dire ? Et là c’est parti pour la « prescription des tâches », à débuter séance tenante. On vous passe les détails, mais il s’agit d’habitudes tabagiques à changer (changer de marque, de main, de doigt,…). Objectif : tester votre motivationà arrêter de fumer. On n’est pas là pour niaiser. Pause clope.

JOUR 1 : LA PREMIÈRE SÉANCE D’HYPNOSE

Même lieu, quelques jours plus tard. On s’installe comme on veut, assis sur une chaise ou à terre, couché sur une table, certains ont pris un oreiller, un matelas de trek : la séance dure environ 2 heures, mieux vaut se mettre à l’aise. Je m’assieds dans un coin, dos au mur. Le Docteur nous rappelle les bases de l’hypnose : détendez-vous, fermez les yeux, écoutez ma voix, et le reste suivra. Ok. C’est parti. Silence. « Vous fixez un point… ». Il se lance dans une logorrhée à base d’images mentales, de points d’ancrage et de métaphores contre lesquels il nous demande de ne pas lutter (satané sens critique). Très bien, c’est cool, le mec parle posément, la tessiture de sa voix rassure. On finit par limite somnoler, à moins qu’il ne s’agisse d’un état légèrement modifié de conscience. Il parle d’un escalier à descendre, de souvenirs heureux à convoquer dans notre cortex, d’un carrefour ou d’une route en Y, de plein de trucs ZzZzZ. À vrai dire on n’en sait rien, et à la fin quand on ouvre les yeux, on n’a pas du tout l’impression d’avoir été « hypnotisé » : juste d’avoir écouté un type nous raconter de drôles d’histoires. Certains ont l’air assez sonné. Affirment avoir rêvé comme des petits bébés. D’autres, comme moi, ont le sale sentiment d’avoir fait « semblant ». « Non mais ça marche pas ton truc, c’est bon ». On part dubitatif.

JOUR 2 : LA DEUXIÈME SÉANCE D’HYPNOSE

Deux jours plus tard. On a bien accompli ses petites tâches. À vrai dire on n’a pas trop fumé, c’est bien. Petit tour de table, de chaise, de sol : certains fument toujours comme des pompiers, d’autres ont bien calmé le jeu, c’est selon. « Ah j’ai vraiment bien dormi le soir de la première séance ! ». Ouais. Cette fois j’ai pris un oreiller et un sac de couchage, et je m’étends sur une table (petit torticolis l’autre jour). Chacun prend position. Silence. « Tendez la main gauche… Fixez, fermez,… ». Je me laisse aller, je suis couché, vazy tu peux y aller. Calme. Confort. Concentration. Je dois m’imaginer en train de faire certaines choses qui subconsciemment me font comprendre qu’arrêter de fumer c’est facile : « L’hypnose est un mode de fonctionnement mental », n’est-il pas. Après une heure et demie de traitement, tout le monde se « réveille » et de nouvelles tâches nous sont prescrites, à honorer jusqu’au jour J : de nouveaux petits rituels de taffes expressément rédhibitoires, qui te font gentiment prendre conscience, petit à petit, du ridicule de ta situation de fumeur (« Fumez toutes vos cigarettes en poirier, sur un balcon, en sous-vêtements » : ok on exagère mais c’est presque l’idée). Le ridicule ne tue pas ? Ouais c’est ça.

JOUR 3 : LA TROISIÈME SÉANCE D’HYPNOSE

C’est bon je fume presque plus là, je me sens comme Rocky face à Drago quand il l’étale par terre d’un bon gros uppercut et que la foule s’enflamme, même les Soviétiques. Je ne suis pas si dépendant que ça, finalement. Ça fait juste deux semaines que je ne suis plus sorti de chez moi par peur d’avoir envie de fumer une cigarette si je vais boire un verre, c’est tout. J’ai fumé deux cigarettes la veille, pareil les jours précédents. Deux-trois. Cette troisième séance se déroule comme les deux premières. Je ne me sens pas hypnotisé comme à la télé, j’ai juste l’impression de suivre des sortes de séances de yoga un peu méditatives, enfin j’en sais rien j’ai jamais fait de yoga. J’écoute ce qu’il raconte de sa voix (très bien) posée : les phrases sont bien articulées, je visualise ce qu’il nous demande de visualiser. Il m’arrive de penser à autre chose. À mon emploi du temps. À la tête que tire ma voisine, qui respire vraiment profondément. La séance est levée, on s’étire un peu les muscles, une dernière tâche bien dégueulasse nous est assignée avant le jour J. Un truc à vous dégoûter une fois pour toutes de fumer… Mais bon, c’est un mal pour un bien. Un mauvais moment à passer. Bien ridicule aussi. C’est le jeu. On ne vous en dit pas plus, afin de préserver le suspense (et vos chances d’arrêter !). Il faudra le faire quatre fois, jusqu’au matin du jour J. C’est à ce moment-là que vous devez « enterrer » définitivement votre tabac, jeter vos dernières cigarettes dans les flammes de l’Enfer, et ne plus jamais fumer.  

JOUR J : LA DERNIÈRE SÉANCE (+ L’AUTO-HYPNOSE) 

« La lumière revient déjà / Et le film est terminé / Je réveille mon voisin / Il dort comme un nouveau-né » : Eddy Mitchell avait vu juste ! Me voilà libéré de ce fardeau qu’était la cigarette !

Une dernière séance d’hypnose pour consolider le bazar et elle est faite Arlette ! Le docteur nous donne des méthodes « pour se libérer des envies désagréables à partir du jour J » (ex. : sucer du citron, allumer la télé, prendre une douche froide, faire du sport, boire beaucoup d’eau, virer les cendriers, changer d’intérieur ou de coupe de cheveux, respirer,…), bref nous voilà parés en cas de coup de mou (ou de sang). Ajoutez à cela une ultime séance le lendemain, d’auto-hypnose, basée sur une technique de respiration (sept en fait) censée calmer le jeu si l’envie de fumer revient… « Vous ouvrez les yeux et vos autres sens et regardez intensément les choses autour de vous ». Jour J+1, +2, +3,… + 7 mois sans fumer. Oui, on vous a menti : ce n’était pas notre bonne résolution de 2019, mais de 2018. À votre santé.

Les 5 séances d’hypnose en groupe vous coûteront 375 euros (soit 75 euros la séance).


INTERVIEW AVEC LE DOCTEUR ERIC MAIRLOT

- En fait c’est quoi l’hypnose ?

C’est un état modifié de conscience naturel qu’on provoque avec des techniques de communication qui facilitent les fonctionnements non volontaires (= le subconscient). Et justement, arrêter de fumer, ça ne fonctionne pas très bien avec la volonté ! C’est pour ça qu’on utilise l’hypnose, qui fait émerger des capacités involontaires. Des capacités indirectes qui sont principalement liées à l’imagerie mentale… Et ces images vont être plus puissantes que la volonté, en vous permettant de vous autonomiser par rapport au tabac. De vous libérer de la dépendance psychologique… Et comme le corps se sent effectivement beaucoup mieux en hypnose, ça calme aussi la dépendance physique ! En d’autres termes, l’hypnose permet à votre cerveau de fonctionner beaucoup mieux, de se concentrer sur un objectif précis : ici se libérer du tabac… L’hypnose permet de mobiliser toute votre énergie mentale pour arriver plus facilement à atteindre votre objectif.

- Mais l’hypnose ce n’est pas que la séance d’hypnose : ça va au-delà.

Exactement. D’ailleurs la dernière séance est centrée sur l’apprentissage de techniques d’auto-hypnose : j’apprends au patient comment se mettre lui-même dans un état auto-hypnotique pour trouver la ressource qui va lui permettre de résoudre son problème intérieur - autrement dit le manque, la nervosité, la contrariété - qu’il essayait d’habitude d’étouffer ou de calmer par le tabac. L’hypnose c’est vraiment rechercher à l’intérieur de soi une ressource dont nous n’étions pas conscients qu’elle pouvait être utilisée.

- L’hypnose débloque quelque chose en nous… Qui nous apparaît bénéfique une fois que le traitement est terminé. Mais sur le moment, on se dit que ça ne va pas marcher. Que ce sera juste ponctuel.

C’est vrai qu’en débutant le traitement, le fumeur a souvent peur d’arrêter de fumer ! Son premier réflexe, c’est donc de voir le négatif (« J’y arriverai jamais »)… Ses motivations même s’avèrent souvent négatives (« J’arrête pour ne pas avoir le cancer »,…). Avec l’hypnose on va orienter l’attitude de façon positive : qu’est-ce que je vais y gagner ? La liberté, l’insouciance, le calme,... On modifie donc vraiment l’attitude du fumeur pour qu’il se rende compte qu’il va vers du positif : c’est une évolution épanouissante et libératrice ! Sans parler du fait qu’il va y gagner en sécurité physique… Bref l’hypnose permet de modifier toute l’attitude du négatif vers le positif, et donc l’attente va être de plus en plus positive : on se projette plus facilement dans le futur en tant que non-fumeur, guéri du tabac. L’hypnose permet au fumeur de se visualiser ayant réussi et ayant obtenu tout ce qu’il souhaitait obtenir.

- Vous faites convoquer des « images mentales » à vos patients lors des séances d’hypnose… Et vous affirmez qu’elles s’avèrent plus puissantes que leur volonté. C’est-à-dire ?

Concrètement je commence par demander à mes patients de trouver en eux un souvenir ou une situation imaginaire qui les rassure, les sécurise, grâce auquel ils se sentent protégés voire insouciants. Ça peut être un souvenir de vacances, d’un moment joyeux, d’un projet qui leur tient à cœur, d’un compliment,… Et donc ils créent par là un état émotionnel que moi je vais relier à une petite phrase hypnotique couplée à un exercice de profonde respiration : on appelle ça un « ancrage »… En réalité c’est l’établissement d’un réflexe conditionné qui fait que quand la personne aura envie de fumer, elle devra penser à ce souvenir tout en exécutant l’exercice de profonde respiration… Résultat : ça produira cette espèce de calme, de sécurité, qui va chasser le stress et l’anxiété d’avoir peur de fumer ou d’avoir envie de fumer ou de ne pas pouvoir fumer. On fait cet ancrage à chaque séance d’hypnose.

- Honnêtement ça m’a paru très vite emballé pesé cette histoire d’ancrage, lors de la première séance d’hypnose… J’ai à peine eu le temps de penser à un souvenir « heureux » qu’on passait déjà à autre chose… Et puis de toute façon ça fait toujours du bien une bonne inspiration, hypnotisé ou pas… Non ?

Oui. Mais ici elle s’avère davantage liée à du bien-être, parce qu’on est capable d’évoquer et de produire du plaisir par la seule force de la pensée ! C’est comme ce patient qui disait « Moi j’ai pas l’impression d’être entré en hypnose, par contre il suffit que je fasse une inspiration profonde et tout de suite ça calme mon envie de fumer » : c’est un bel exemple de quelqu’un qui ne se rend pas compte qu’il a vécu un état hypnotique – puisque tout se passe à un niveau subconscient… Autrement dit on ne se rend pas compte effectivement de tout ce qui se passe MAIS on a desressources qui viennent au moment voulu.

- Ça dépend quand même d’un individu à l’autre, non ?

C’est vrai que certains vont le vivre de manière évidente, et d’autres moins... Mais ce n’est pas pour ça que ça ne marche pas !

- Disons qu’il est quand même préférable de se mettre dans de «bonnes dispositions»… Y a-t-il en l’occurrence une forme d’autosuggestion dans l’hypnose ?

Bien sûr, mais si vous faites de l’autosuggestion inverse en vous disant « Ouais ça marche pas trop », évidemment ça va moins bien marcher que si vous vous dites l’inverse ! Il faut y croire parce que ça augmente la puissance de l’ancrage.

- Donc cette autosuggestion s’avère également un procédé médical.  

Tout à fait. On a beaucoup travaillé scientifiquement sur l’effet placebo. Ça a une influence sur plus de 70% des gens ! Si vous vous dites « Ça va calmer mes envies de fumer », vous vous faites une autosuggestion positive… Tandis que si vous vous dites « Ouais y a rien qui peut m’aider pour calmer mes envies, même pas un médicament », eh bien même si le médicament aide, vous faites un effet « nocebo »… C’est l’inverse du placebo : la pensée négative va annuler l’effet, même si c’est un vrai médicament ! C’est pour cela qu’il y a des gens qui arrivent à ne pas ressentir l’effet d’un antidépresseur : parce qu’ils font des auto-hypnoses négatives et du coup ils ne profitent pas de l’effet positif du médicament.

- A priori une personne qui se lance dans des séances d’hypnose s’inscrit déjà forcément dans une démarche individuelle volontariste – d’autant qu’il paie pour ça ! On vient que si on a envie d’arrêter de fumer, non ?

C’est vrai mais il y en a quand même pas mal qui viennent parce qu’ils sont obligés ! Ils ont envie de continuer à fumer mais leur médecin leur a dit d’arrêter…

- Donc ça marche moins bien sur eux ?

Un peu mais il y a quand même pas mal de ces patients chez qui ça marche quand même... Donc ça montre que l’hypnose peut vraiment augmenter l’importance de la motivation d’arrêter et diminuer l’importance de ce qui donne envie de continuer à fumer.

- Vous affirmez qu’à la base la plupart des gens sont réceptifs à l’hypnose.  

Oui, la grande majorité : 95% y sont sensibles. Maintenant il reste la démarche psychologique : l’hypnose en tant que telle ne suffit pas pour arrêter de fumer ! L’hypnose n’est pas en soi un médicament. Si la personne veut pas écouter les suggestions elle continuera à fumer : il est impossible de faire faire à quelqu’un quelque chose qu’il ne veut pas faire. Mon travail à moi consiste d’abord à suggérer au patient que les forces positives vont chasser les envies négatives de continuer à fumer : ça c’est le premier traitement de la motivation… Le deuxième c’est quand lors des séances j’utilise des métaphores d’apprentissage : quand je vous demande de vous visualiser étant bébé et apprenant à marcher, c’est une métaphore de l’apprentissage à se libérer du tabac.

- Quand vous nous demandez de visualiser ça lors des séances, ça peut paraitre très naïf, non ? C’est ce que moi j’ai ressenti sur le moment. La métaphore on la capte directement : on sait où vous voulez en venir.

En fait ce sont des métaphores qui redonnent confiance... Mais surtout qui réactivent des capacités de changement et d’évolution. Ça peut paraître naïf mais en hypnose c’est très puissant ! C’est Milton Erickson (un grand psychologue et psychiatre américain expert en hypnose thérapeutique et clinique, ndlr) qui a inventé ça : qu’est-ce qu’on a appris qui nous paraît facile après coup ? Marcher, lire, nager,… C’était super difficile et on ne s’en souvient pas – mais le corps, l’inconscient, eux, s’en souviennent ! Se souvenir qu’on a réussi plein d’apprentissages (écrire, lire,...), ça stimule l’ouverture à l’apprentissage de quelque chose de nouveau… Les métaphores visent donc à ouvrir au changement et à activer les ressources de ce changement ! Grâce à l’hypnose on arrive à mobiliser des ressources qui paraissent naïves comme ça mais qui s’avèrent en fait fondamentales.

- Et le fait de faire de l’hypnose en groupe (dans ce cas-ci), c’est plus efficace ou moins efficace qu’en individuel ?

C’est plus efficace. J’ai fait pendant 15 ans de l’individuel et j’avais un taux de réussite inférieur au groupe. Cela s’explique du fait que les séances d’hypnose collective sont plus longues - on discute plus longtemps aussi - et les gens entendent les réponses aux questions des autres qu’ils n’osaient pas eux-mêmes poser… Bref deux heures au lieu de trois-quarts d’heure ça fait quand même une belle différence ! Du coup les séances sont plus riches, il y a plus de suggestions, et en plus il y a une énergie de groupe qui fonctionne indépendamment de la conscience - ça c’est étonnant ! Il y en a beaucoup qui ne voulaient pas faire de groupe et qui me disent après coup que ça les a portés ! Il y a une énergie de groupe qui est aussi puissante que l’hypnose.

- Qu’est-ce qu’il ne faut absolument pas faire pour rechuter ?

Le seul conseil clair que je donne dans le sens de l’interdiction, c’est de ne pas être dans une «bulle à deux» : autrement dit d’éviter, les premières semaines, d’être avec quelqu’un qu’on connaît et qui fume. De se mettre dans une situation où il y a une seule cigarette et c’est l’autre qui la fume : là le risque de reprendre une cigarette est énorme… Cette bulle d’intimité, c’est le plus risqué. Le mieux dans ces cas-là c’est de demander à l’autre d’aller fumer ailleurs, dehors… Sinon dans les autres situations, je recommande de fréquenter les fumeurs comme d’habitude, avec un seul bémol : l’alcool, qui diminue le sens critique et les capacités de jugement… Et puis sous alcool il y a des vieux mécanismes qui peuvent se remettre en route : il y a un lien quasiment hypnotique d’association, de conditionnement, entre l’action de boire un verre et celle de fumer une cigarette. La protection hypnotique est moins forte sous alcool.

- Ok. Et la question cruciale du poids ? On dit souvent qu’arrêter de fumer fait grossir. Genre on compense ce manque par la nourriture…

La prise de poids est assez peu fréquente. Pourquoi ? Parce que les gens qui prennent du poids sont ceux qui arrêtent de fumer par la volonté ou à l’aide de médicaments. Il n’y a pas chez eux de réel processus de changement qui est instauré. Ils font de gros efforts pour arrêter de fumer et il y a un risque de compensation. Parce qu’on a l’impression qu’on manque vraiment de quelque chose. Alors qu’ici c’est vraiment une mini-psychothérapie qui se fait par hypnose, et du coup on n’a pas besoin de compenser.

- Et si on rechute malgré tout ? Faut-il recommencer l’hypnose ?

Oui tout à fait. Tout le monde est sujet à l’erreur ! Les gens qui n’ont jamais rechuté et qui font le traitement pour la première fois ont plus de risques de rechuter que les autres parce qu’ils ne savent pas qu’il suffit d’une bouffée de cigarette pour rechuter. Les gens ne sont pas conscients de ça. Ça réveille tous les récepteurs qui étaient juste endormis et le manque revient… Alors qu’on n’avait plus de manque depuis 5, 10 ans.

- Vous mettez tout de suite vos patients en garde à ce sujet, c’est vrai. Une seule taffe. Dur. Donc si je tire une fois sur une cigarette, c’est foutu !?! C’est la rechute directe ?

Il y en a qui prennent « juste une taffe » et qui rechutent dès le lendemain… Et il y a ceux qui reprennent une taffe et trouvent ça dégueulasse et se disent « Wow ! Je suis guéri je n’aime plus fumer ! »… Et du coup ils se créent une illusion qui devient extrêmement dangereuse parce qu’ils croient qu’ils ne rechuteront pas et ils taffent donc de temps en temps et à chaque fois la méfiance par rapport au tabac diminue du coup ils se l’autorisent de plus en plus souvent puis ça va être 2 cigarettes et pour finir ils rechutent complètement et ils fument plus qu’avant.

- La cigarette électronique, bien ou mal ?

Je déconseille avec la nicotine parce que (forcément , ndlr) ça rend dépendant à la nicotine… Mais à vrai dire je déconseille aussi sans, parce qu’on entretient la gestuelle – bref je déconseille !

- Que pourriez-vous dire à nos lectrices (et lecteurs) qui ont peur de l’hypnose, qui ont une image « messmerisée » de la pratique ?

L’hypnose qu’on utilise n’a rien à voir avec celle de Messmer : ici ce n’est pas une hypnose autoritaire (et taillée pour le divertissement, ndlr) où l’on perd le contrôle, que du contraire : l’hypnose permet d’être plus conscient de nos capacités à arrêter de fumer… En fait vous apprenez des techniques qui se révèlent plutôt de l’ordre de l’auto-hypnose, et vous êtes accompagnés pendant tout le processus… Il n’y a vraiment aucune raison d’avoir peur de l’hypnose ! Elle permet de nous épanouir. Vous n’êtes ni dirigés, ni contrôlés : simplement stimulés pour trouver en vous des capacités de contrôle nouvelles… Ou récupérer des capacités que vous avez déjà utilisées dans votre vie, pour les mettre au service du sevrage.

CONCLUSION : QUE PENSER DE L'HYPNOSE POUR ARRÊTER DE FUMER ?

Si plusieurs solutions existent pour arrêter de fumer, il en est une qui a fait ses preuves : l’hypnose.

Elle peut faire peur à certains fumeurs, pourtant il ne s’agit en aucun cas de perdre le contrôle et d’être manipulé par le praticien. Il est juste question de reprendre conscience de ses capacités intérieures et de mobiliser toute son énergie pour accéder facilement au sevrage.

Là où la motivation et la bonne volonté ne suffisent pas, les séances d’hypnose réveillent les forces positives du patient. Le cerveau se concentre sur l’objectif à atteindre : se libérer de la dépendance au tabac.

Pour favoriser la réussite de cette méthode et éviter la récidive, il est préférable de suivre quelques règles élémentaires. Il faut y croire, comme un effet placebo.

Il vaut mieux éviter de consommer de l’alcool, notamment en grande quantité : il risquerait de neutraliser les capacités de jugement. Il est également conseillé de limiter les contacts avec les fumeurs : l’envie de reprendre une petite bouffée de cigarette serait grande et ruinerait tout le processus.

Cette méthode offre plusieurs avantages : elle ne provoque aucun effet secondaire ni reprise de poids. Si quelques personnes restent dubitatives quant à l’efficacité de l’hypnose pour arrêter de fumer, le mieux est encore d’essayer.

 

Presse écrite